« Je n’ai pas peur d’afficher mes couleurs. J’essaie de transformer le négatif de manière à ce qu’on devienne fiers de notre culture, qu’on n’ait pas peur d’en être fiers. Lorsqu’on me regarde, on voit l’Européen avant l’Autochtone. Je peux être un facilitateur d’approche pour ceux qui ne connaissent pas bien la culture, pour ceux qui n’osent pas. Je crée souvent les liens. »
En grandissant, Tom passe beaucoup de temps en forêt en compagnie de sa famille. Son père l’emmène régulièrement avec lui et c’est à ses côtés qu’il apprend la trappe et la pêche. Dès l’enfance, Tom démontre un intérêt marqué pour les arts et lorsqu’il termine l’école secondaire, il traverse le parc de la Vérendrye pour rejoindre Montréal, où l’infographie et le design graphique sont en pleine effervescence. Au terme de ses études en 2003, il se déniche rapidement un emploi auprès du Festival Présence autochtone, lequel utilise toujours le logo créé par Tom. Cette première collaboration marque le début d’un beau voyage professionnel qui se poursuit à ce jour, mais surtout, qui est devenu le noyau d’une quête : celle de son identité.
Dans les années qui suivent, Tom prend part au festival en tant qu’artiste et les recherches qu’il entreprend pour réaliser ses projets lui permettent de découvrir les légendes autochtones, les jeux traditionnels, l’iconographie anicinabe et tous ces aspects de sa culture qu’il n’avait pas encore eu l’occasion d’explorer. Par la suite, Tom travaille pour plusieurs agences de design graphique, principalement en publicité, tout en restant en contact avec le festival.
En 2009, Tom fait un retour en région pour vivre près de sa famille et prête ses talents aux journaux locaux. Il se lasse toutefois rapidement du « graphisme à la chaîne » et, se sentant prêt pour un nouveau défi, il rejoint les rangs du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or– Il est d’ailleurs possible d’y admirer ses œuvres, lesquelles allient la tradition et ses symboles à la modernité grâce aux outils numériques. Il occupe successivement les postes de coordonnateur à l’économie sociale, puis directeur. Tom poursuit parallèlement une carrière artistique qui l’a amené à présenter plusieurs expositions. Chacune d’entre elles est une occasion d’affirmer ses couleurs et de dénoncer les injustices qu’il observe. Sa première exposition solo, intitulée Code Rouge, est présentée à la galerie Connivence en 2015.
« Si je peux être un incitatif pour les autres, un motivateur et si je peux mobiliser les jeunes artistes, surtout ceux qui vivent sur les réserves où la vie n’est pas toujours drôle, ce serait intéressant. »
Dans tout ce qu’il accomplit, que ce soit par son art ou par son implication sociale, Tom se retrouve souvent à jouer un rôle d’intermédiaire, de maillon connecteur. Graviter dans les milieux culturels autochtones, notamment dans le sillon du Festival Présence autochtone, a généré en lui le désir de contribuer à rendre visible l’injustice dont sont victimes les Premières Nations. Il s’implique afin que ses proches et, plus globalement, son peuple, se sentent fiers de leur identité et de leur culture. Animé d’une compassion d’une rare puissance, il n’est pas de ceux qui savent se montrer indifférents à la souffrance des autres. Son art est un moyen de s’impliquer dans les causes qui lui tiennent à cœur, dont la prévention du suicide, la lutte contre les dépendances aux drogues et à l’alcool, l’exclusion sociale et le racisme. « Fils de deux nations ayant été envahies et attaquées », il souhaite que son art agisse comme une invitation à se relever, à montrer sa fierté. L’art, croit-il intimement, a cette capacité transformatrice qui sait faire naître la beauté de la douleur. Tom rêve d’équité pour l’avenir, il entrevoit une société où l’on sait redonner sa place aux cultures autochtones de façon à en faire une fierté pour tous. Il travaille donc activement à l’établissement de nouvelles relations entre les peuples, fondées sur la confiance mutuelle, la patience et l’écoute.
« On n’oublie pas le passé, mais si on continue dans la même voie, ça ne s’améliorera pas. Ça prend parfois un poing sur la table pour faire réagir certaines personnes, mais je pense que c’est l’art qui permet la fierté et le changement des perceptions. Il faut l’amener sainement, sans mettre de l’huile sur le feu. Il ne faut pas nourrir la haine, mais amener les gens, surtout ceux qui ont vécu de l’exclusion sociale, vers du positif. »